Si les parisiens ont été héroïques et ont mérité leur qualification, on ne peut pas en dire autant de l’équipe de José Mourinho. En supériorité numérique durant une bonne partie du match, Chelsea n’a jamais pris le dessus sur le PSG. Ou par intermittence. Lors de ce huitième de finale de la Ligue des Champions, s’il y a bien une équipe qui mérite la qualification, c’est bien Paris. Ne serait-ce pour le ballon ; pour l’ambition du jeu. Et bien sûr pour l’attitude dans la difficulté. Chelsea a montré d’étonnants signes de fébrilité pour une équipe à 11 contre 10 à domicile. Si « une équipe ne mérite pas de gagner parce qu’elle ne gère pas la pression à domicile avec un joueur de plus » selon Mourinho, ce dernier a aussi sa part de responsabilité.

La guerre des mots

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José Mourinho lors de la conférence de presse le Mardi 10 Mars 2015

En conférence de presse, rien n’a changé. José Mourinho est le « putain de chef » comme le disait Pep Guardiola en 2011. Le Mou gagne l’avant-match, à chaque fois. Il calcule tout. Peut-être trop. Provocations envers l’adversaire, jeu sur les mots, pression sur l’arbitrage, Mourinho en devient presque fatiguant. C’est d’ailleurs aussi pour cela qu’il n’a pas continué à Madrid, et pour bien plus…

Contre le Paris Saint-Germain, en huitièmes de finale de la Ligue des Champions, cela n’a pas raté. En Décembre, alors que le tirage n’est pas encore connu, José Mourinho évoque déjà ses préférences.

« Paris, ce serait bien, parce que c’est un déplacement facile pour nous et pour nos supporters. Mais nous ne pouvons pas décider du tirage au sort »

Grâce à un mot, José Mourinho a déjà fait une bonne part du boulot : il a agité la presse française qui n’en demandait pas tant. Son Chelsea roule sur la Premier League, il a monté une équipe capable de jouer sur tous les tableaux, qui s’est renforcée individuellement. Son plan est en marche.

Nous sommes le 10 Mars 2015. À l’aller, le Mou a cherché le résultat qu’il voulait : le nul avec un but à l’extérieur. Et si son équipe n’a tiré que deux fois au but en 90 minutes, The Only One ose affirme qu’il « s’attendait à plus de football de la part du PSG ». La presse nous raconte aussi qu’il a « espionné » l’entrainement à huit-clos du PSG la veille du match… Il évoque même l’arbitre : «Je n’envoie pas de message à M. Kuipers, il a un job à faire, c’est tout»

Pris à son propre piège

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Jouer contre J.Mourinho en Ligue des Champions est toujours très compliqué. Nous avons cette impression qu’il a ce coup d’avance. Il connaît nos intentions. The Special One est un destructeur. Il détruit les plans adverses. Il détruit les ambitions, les objectifs. Il détruit les idées, les rêves ennemis.

Néanmoins, sa technique en C1 commence quelque peu à s’essouffler. En effet, à force de vouloir faire déjouer l’adversaire, le Mou oublie l’essence même de ce sport : jouer. À force de se concentrer sur les faiblesses adverses, il en oublie les forces de son équipe. Comment est-ce possible que son équipe, « bâtie pour jouer autour d’Eden Hazard » selon ses dires, propose un tel football et se fasse autant dominer en supériorité numérique ? D’ailleurs, à propos du belge, est-ce vraiment sa faute ? Il doit être plus décisif, mais les ambitions de jeu de José ne l’aident pas. On pourra en parler dans un autre article.

Revenons au Mou. Il a connu 4 désillusions consécutives en ½ finale de Ligue des Champions (contre le FC Barcelone, le Bayern Munich, le Borussia Dortmund et l’Atlético de Madrid). Les deux derniers sont sûrement les plus intéressants. Parce que si contre le Bayern, la décision s’est jouée sur la loterie des T.A.B, le BVB et l’Atléti ont entièrement mérité leur qualification.

La double confrontation contre les colchoneros est l’une des plus mystérieuses que j’ai eu l’occasion de voir. À l’aller, au Vincente-Calderon, Chelsea met « le bus » comme on aime tant dire. Il joue littéralement le 0-0. Cette fois-ci, il ne veut même pas marquer son but à l’extérieur si important pour lui. Il ne propose absolument rien. Il refuse le jeu, il laisse la possession à l’Atleti. On peut se dire que ce n’est pas bête vu le jeu si caractéristique de l’Atlético, qui aime jouer très bas et fermer les espaces – leur défense est impériale quand elle est basse sur le terrain –, mais pourquoi ne montrer aucune ambition offensive et ne pas piéger les espagnols en contre ?

Mou le paiera très cher lors du match retour. Si Fernando Torres ouvre le score à Stamford Bridge, les madrilènes donnent une leçon de football aux Blues de Chelsea et signent une superbe prestation. Toujours si vaillants, les colchoneros produisent un jeu de qualité, porté vers l’avant. Cela paye puisqu’ils s’imposeront 3-1 et Mou perdra son pari.

Contre le PSG, Chelsea est qualifié au coup-d’envoi. En sécurité. Le seul objectif de José Mourinho quand son équipe se déplace lors du match aller. Après l’expulsion de Zlatan Ibrahimovic, on pense que le sort est déjà scellé. On pense même qu’il n’y aura presque rien à redire sur le match, marqué par ce rouge, qui allait donner de l’ombre à l’analyse.

Pourtant, le PSG va réussir à se qualifier, grâce à une grande force de caractère et de meilleures intention sur le pré. Mais si les parisiens ont mérité leur qualification, Chelsea a été très décevant dans le jeu.

Ce qui est interpellant, côté londonien, est la fébrilité remarquée. En seconde période par exemple, le PSG a eu énormément d’occasions, notamment le raté d’Edinson Cavani après un beau travail de la part de Marco Verratti et Javier Pastore. Côté parisien, on pense alors qu’il y a quelque chose à faire. Ce manque de sérénité est très surprenant connaissant José Mourinho. Cela ne ressemble pas au personnage. Cela ne ressemble pas à son équipe. Que ce soit l’Inter 2010 ou le Real en 2012, on remarque une énorme détermination, une très grande force de caractère, à l’image de son entraîneur. Mais quand on l’observe de plus près, on a l’impression qu’il s’essouffle. Qu’il pense à réinventer, que le lapin dans le chapeau du magicien n’est plus. En témoigne d’ailleurs les déclarations de Thiago Motta après le match.

« Nous étions très préparés pour ce match […] Je n’ai pas été surpris par Chelsea.« 

Il suffit de connaître le personnage pour savoir ses intentions durant cette double confrontation. Un milieu renforcé à l’extérieur, pour piéger l’adversaire en contre et marquer le but si précieux. À domicile, Ramires est préféré à Willian, le plan n’est toujours pas de marcher sur l’adversaire, de lui rouler dessus et de marquer. Le plan est d’attendre l’équipe adverse et de la punir. De frustrer l’adversaire. Avec des milieux qui n’ont pas le profil pour jouer ainsi. À domicile qui plus est. Devant son public.

Mais le Mou a été pris à son propre piège. Il a été puni, logiquement car Chelsea n’a jamais montré d’intentions claires pour passer. Et la qualification des Blues ne s’est jouée à rien. On aurait presque dit que les buts marqués par le PSG étaient inspirés des équipes de José Mourinho, dans le caractère, au niveau des conséquences tragiques pour l’adversaire. Se faire punir deux fois sur corner est un comble pour le technicien portugais. Finalement, c’est peut-être un juste retour des choses.

José a perdu. Une nouvelle fois en C1, et c’est tout sauf un hasard. On peut se demander s’il est dans la caricature, s’il peine à se réinventer, s’il s’essouffle. Néanmoins, tout n’est pas à jeter. Il faut savoir nuancer. Les joueurs sur la pelouse ont leur responsabilité, ils n’ont pas répondu aux attentes, notamment dans le domaine mental. José Mourinho fait évidemment partie des meilleurs entraîneurs du monde même si son style divise. Son palmarès parle pour lui, la saison des Blues aussi, après la League Cup glanée contre les Spurs, la Premier League est à portée de main, malgré la contre-performance contre Southampton à domicile ce dimanche 15 Mars. Cependant, en Champion’s League, Mourinho peine de plus en plus. L’effet de surprise n’est plus. Pire encore, il lasse, ses provocations en sont épuisantes. C’est comme si on avait fait le tour du personnage ; qu’on l’avait étudié dans tous les aspects. Cela fait plusieurs années qu’on attend ce nouveau coup de maître, ce coup de génie qu’il a su sortir à de nombreuses reprises par le passé. Lointaine est l’époque où José Mourinho affirmait qu’il avait ce truc que les autres n’ont pas. Quelque chose de… Special.

rany

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