Auteur d’un très bon début de saison avec Chelsea, Diego Costa a connu une énorme progression et est l’un des meilleurs attaquants les plus redoutés depuis maintenant un an. Pourtant, tout n’a pas été simple. Diego Costa, c’est l’histoire d’un voyou. L’histoire d’un sale gosse qui ne se laisse pas emmerder par ceux qui lui disent d’arrêter de jouer devant leurs maisons. L’histoire d’un homme qui revient de loin. Portrait.

« En grandissant, on m’a fait comprendre qu’un coup de coude était normal. La rue a été mon école ».

jeuneAvant de devenir le buteur redouté qu’il est, Diego Costa était surtout connu pour être le joueur le plus détesté de l’Espagne. Le méchant, le mauvais garçon. Vicieux, Diego Costa est un fouteur de merde. Il naît au nord-est du Brésil, à Lagarto dans l’État du Sergipe et connaît dès le plus jeune âge la misère et la délinquance des favelas brésiliennes. Il joue au football dans la rue. Son parcours sera compliqué, sinueux, avec des obstacles, mais le résultat en vaudra la peine. Avant de devenir professionnel, Diego Costa traîne dans la rue, se débrouille comme il peut. À l’heure où les stars d’aujourd’hui débutent dans le football, le jeune Diego fait passer des habits en contrebande par la frontière uruguayenne. Chacun son truc.

« On n’avait pas faim, on n’était pas pauvres, mais on avait la vie dure. Ma ville n’avait pas de structures ni de ressources, alors on s’est crée une équipe de rue, on allait jouer contre d’autres équipes des villes voisines. » Diego Costa

En 2006, tout bascule. Il joue le match qui va conditionner la suite de sa carrière. Pourtant, il ne devait pas jouer à cause de sa suspension (les cartons et Diego Costa, on en reparlera). Le club portugais de Braga le repère et le signe. Mais pendant plusieurs années, il est prêté chaque saison. Après avoir joué avec la réserve au Sporting de Braga, il est prêté au FC Penafiel en D2 portugaise. En 2007, l’Atlético de Madrid le recrute et le prête dans la foulée à Braga. Lors de la saison 2007-2008, il est prêté au Celta Vigo (alors en Liga Adelante), l’année suivante, il est prêté à l’Albacete Balompié. Lors de la saison 2009-2010, Diego Costa est prêté au Real Valladolid pendant que Sergio Asenjo (désormais à Villarreal) signe à l’Atlético. Chemin semé d’embûches mais des difficultés pas insurmontables pour un joueur avec un caractère si trempé et un comportement qui provoque en lui une certaine instabilité. Son comportement peut s’expliquer par le fait qu’il n’a pas connu une réelle éducation, lui errant dans les rues brésiliennes. « Je ne pouvais pas me contrôler. Je ne respectais mes collègues. Une éducation m’aurait appris ces choses-là. » D’ailleurs, entre 2006 et 2010, du Portugal à l’Espagne, de la D1 portugaise en passant par la D2 espagnole, il récolte 64 cartons jaunes et 4 cartons rouges.

diegocosta19Diego Costa en prêt au Celta Vigo, à 19 ans.

Une étape importante : la confiance de Diego Simeone

hi-res-456888819-diego-costa-of-club-atletico-de-madrid-celebrates-after_crop_northBarré par Diego Forlan et Sergio Agüero, Diego Costa revient à l’Atlético de Madrid après plusieurs prêts, mais sur le banc. Il profite cependant d’une altercation entre le joueur uruguayen et Quique Sánchez Flores, alors entraîneur de l’Atleti pour jouer en fin de saison. Il réalise son meilleur match de la saison avec un triplé sur la pelouse d’Osasuna et donne ainsi la victoire aux colchoneros. Malheureusement, lors de l’été 2011, il se blesse au genou droit. Il est ensuite prêté au Rayo Vallecano début 2012 et revient sur les terrains contre le Real Saragosse en inscrivant un but. D.Costa permet au club madrilène de se maintenir en Liga BBVA en marquant 10 buts en 16 matchs.

 Il revient à l’Atlético de Madrid lors de la saison 2012-2013 et prendra une place de plus en plus importante. Néanmoins, en début de saison, il est sur le banc et regarde Radamel Falcao et Adrian jouer. D.Costa arrive à prendre la place d’Adrian (désormais au FC Porto) et constitue un duo d’enfer avec le buteur colombien. Ils n’ont pourtant rien à voir : Falcao c’est les cheveux lisses, un sens du but hors-norme et une bonne technique, alors que Diego Costa c’est la brute mauvais garçon, le voyou plus connu pour son comportement détestable que son jeu balle au pied. Et c’est pour cela qu’ils sont complémentaires : Diego Costa attire l’œil des défenseurs adverses et permet de créer des occasions pour son compère colombien. Mais Costa garde encore des stigmates de son passé : chassez le naturel, il revient au galop. Hiver 2012, derby madrilène entre les deux ennemis de la ville. Diego Costa se liera d’amitié avec Sergio Ramos, Pepe et Xabi Alonso. Tout y passera. Les plus belles attentions : les caresses provocantes, les crachats jusqu’aux insultes devenues.. habituelles. Pas le moindre reproche de l’homme en jaune. Cette fois ci.

Mais l’attaquant de l’équipe d’El Cholo le payera cher une semaine plus tard. Lors d’un déplacement sur le terrain du Viktoria Plzen, Diego Costa donne un petit coup de tête à Limbersky, le joueur adverse. Exclu, logiquement. L’Atletico perd et laissera ce soir là la première place du groupe d’Europa League à leurs adversaires du soir. Bêtement. Cet acte agace Diego Simeone mais qui ne le montre pas en public et le défend, comme toujours : « C’est un joueur très important, nous croyons en lui. Ce qu’en disent les autres ne m’intéresse pas ». Mais dans les vestiaires, Diego Costa doit franchir une étape au niveau de son mental et cesser les expulsions bêtes. Il transformera ce côté voyou, de la rue, (voire de petite salope, n’ayons pas peur des mots) en force sur le pré. Finalement, le contact, les bagarres, les insultes font partie de lui, c’est sa force. En fait, il est le voyou qu’il était dans la rue. Il est joueur de football professionnel mais garde tous les codes du football qu’il pratiquait plus jeune dans les favelas brésiliennes. Et ça marche. Il devient le joueur provoquant le plus de fautes et un nombre incalculable de cartons (une vingtaine dont 4 cartons rouges).

« Je n’ai aucun problème avec Falcao : il joue avec respect, il ne cherche jamais la merde… Contrairement à Diego Costa ». Sergio Ramos après le derby du 03.12.12 (victoire 2-0 du Real Madrid)

Ce sont surtout les performances de Diego Costa en Copa del Rey qui sont très satisfaisantes. En effet, il termine meilleur buteur de la compétition avec 8 buts en 8 matchs dont l’égalisation au Santiago Bernabeu en finale contre le Real Madrid. Les colchoneros remportent cette Coupe du Roi dans les prolongations (victoire 2-1) et font le doublé après avoir remporté la Supercoupe d’Europe face à un Chelsea (4-1) en début de saison.

« Bref, monsieur Costa, la prochaine fois, tes bruits de singe, tu les garderas.. » Geoffrey Kondogbia sur son Twitter après avoir été exclu lors de Séville-Atletico en Coupe du Roi.

2013-2014 : une nouvelle dimension

1222552-25502942-1600-900La saison 2013-2014 est incontestablement la meilleure pour le buteur brésilien (pas pour longtemps). Il profite du départ de Radamel Falcao vers l’AS Monaco pour 60M€ pour s’imposer définitivement dans l’attaque des colchoneros. Doté d’une grosse marge de progression, Diego Costa franchit un cap lors de cette saison. Il marque 27 buts en 32 matchs de Liga dont un au Santiago Bernabeu pour une victoire (0-1) de l’équipe de Diego Simeone. D’ailleurs, lors de ce derby, on ne change pas les bonnes habitudes. Le début de saison de Diego Costa est très fort : il marque 19 buts lors des 17 premières journées du championnat espagnol, ce qui le propulse en tête du cassement des buteurs devant Cristiano Ronaldo (qui sera finalement Pichichi avec 31 buts) et Lionel Messi. Il brille aussi en Ligue des Champions en marquant 8 buts en 9 matchs de la plus prestigieuse des compétitions européennes. Pas mal pour une première campagne. D.Costa marque notamment lors des 1/8 de finale contre l’AC Milan (5-1 en tout pour l’Atleti) et à Stamford Bridge contre sa future équipe (3-1 sur l’ensemble de la demie-finale pour Atletico de Madrid). Cette saison est historique pour l’Atletico de Madrid. En effet, l’équipe d’El Cholo gagnera la Liga avec notamment une immense régularité et une force collective impressionnante. Chaque week-end, on a pensé que l’équipe allait lâcher, perdre des points et donc se faire dépasser au classement. Il n’en est rien. La Ligue des Champions est aussi à Madrid, mais au Real, pour quelques minutes près.

« J’adore ce joueur. Je trouve qu’il a un potentiel énorme : il va vite, il est puissant, il est bon de la tête, il est technique. Après, c’est un caractère bien trempé, ce qui est normal pour un compétiteur. J’ai beaucoup d’admiration pour ce joueur là, même s’il peut agacer. Pour son équipe, c’est un joueur très utile. Il vaut mieux l’avoir avec soi que contre soi ». Philippe Montanier

Cette finale, Diego Costa doit en garder un mauvais souvenir. Il sort au bout de 9 minutes à cause d’une blessure aux ischio-jambier qu’il a contracté sur la pelouse du FC Barcelone lors de la « finale » de la Liga (1-1 synonyme de titre pour l’Atletico). L’avant centre avait fait un déplacement à Belgrade pour être soigné par Marijana Kovacevic, surnommée « Docteur Miracle ». Cette guérisseuse pratique un message à base de placenta de cheval et d’électrodes envoyées directement sur le muscle. Cela a fait le bonheur notamment de Robin Van Persie ou encore Franck Lampard. Mais ça n’a pas tenu pour Diego Costa qui forcera dangereusement durant les semaines à venir mais sera tout de même présent avec l’Espagne pour la Coupe du Monde au Brésil.

 Le choix polémique

1394060671_767429_1394060761_noticia_grandeIl est convoqué avec le Brésil pour deux matchs amicaux. Une grande opportunité. Un rêve. Mais Diego Costa prend une autre dimension, il enchaîne les buts, l’Europe commence à le connaître, il obtient la nationalité espagnole (habitant en Espagne depuis 2007). Fin octobre, il choisit finalement pour l’Espagne. D.Costa s’explique : « Cela a été une décision assez compliquée, comme peut l’être la décision de choisi entre le pays où tu es né et le pays qui t’a tout donné, l’Espagne. La bonne chose à faire est de jouer en Espagne parce que j’ai tout fait ici, tout ce que j’ai, c’est ce pays qui me l’a donné (…) Ici je me sens apprécié pour tout ce que je fais au quotidien et je ressens l’affection des gens».

S’il espère « que les gens comprendront et respecteront » sa décision, la réalité est tout autre. Diego Costa provoque une polémique au Brésil. Felipe Scolari, alors sélectionneur de l’équipe nationale du Brésil ne comprend pas : « Un Brésilien qui refuse le maillot qui pourrait lui permettre de disputer le Mondial dans son pays est forcément exclu de ma liste. Il tourne le dos à un rêve partagé par des millions de personnes. Il tourne le dos à une sélection qui a gagné cinq fois le Mondial et qui va le disputer devant ses fans ! ». A Fortaleza, le slogan de la nouvelle publicité Volkswagen est le suivant: « Cette voiture enchante le peuple brésilien, à la différence de Diego Costa ». Pire encore, un scénario où on voit la Roja obtenir un pénalty à la 90è min de la finale de la Coupe du Monde contre le Brésil, et c’est Diego Costa qui tire. Bien sûr, il ne le marquera pas. La réalité du terrain n’est pas la même. Que ce soit l’Espagne ou le Brésil, les deux feront une Coupe du Monde absolument catastrophique. L’Espagne finira un cycle couronné de succès en se faisant éliminer des poules avec notamment une déroute contre les Pays-Bas. Mais compréhensible pour une équipe qui a tant régné sur le football européen et mondial. Le Brésil connaîtra aussi sa déroute, bien plus cruelle. Les brésiliens se qualifieront jusqu’en 1/2 finale de la Coupe du Monde, sans convaincre. L’Allemagne, futur vainqueur, humiliera l’équipe de Felipe Scolari sur un score de 7-1, à domicile. Gênant.

Le niveau de Diego Costa sous le maillot de la Roja est peut-être le seul hic que l’on peut lui reprocher actuellement (avec aussi peut-être trop de blessures?).  Le problème est-il au niveau du mental ? Mais le nouvel attaquant des Blues est-il fait pour jouer dans le jeu espagnol que l’on connaît: de possession, de redoublement de passes, sur un rythme très lent et profitant de toute la largeur du terrain ? Que ce soit à l’Atletico ou à Chelsea, Diego Costa est comme un poisson dans l’eau. Les deux équipes ne ressemblent en rien à la Roja. L’équipe de Diego Simeone et de José Mourinho aiment la verticalité, le jeu direct et Diego Costa s’épanouit comme ça. C’est un joueur qui aime prendre l’espace et être servi dans la profondeur. C’est comme cela qu’il fait parler ses qualités sa vitesse, sa puissance ou encore son jeu sans ballon. Les doutes subsistent encore pour celui qui a marqué son premier marqué après plus de 500 minutes de jeu (et 7 sélections) avec le maillot de l’Espagne. À titre de comparaison, il en a mis 8 avec Chelsea en autant de temps.

 L’attaquant parfait pour Chelsea

Diego+Costa+Chelsea+v+Arsenal+Premier+League+SL6ngVHDrsIxChelsea a fait un mercato très intéressant et l’arrivée de Diego Costa en est la preuve. L’année dernière, l’équipe de José Mourinho manquait d’un grand attaquant et d’un joueur créatif au milieu : le technicien portugais recrute cet été Diego Costa et Cesc Fabregas. Ça tombe bien, les deux s’entendent à merveille. Diego Costa fait un début de saison explosif en Premier League avec 11 buts en 12 matchs. Parmi ces buts, 5 ont été marqués du pied droit, 4 du gauche et 2 de la tête. 34 tirs dont 81% cadrés. 30 tirs dans la surface. Ces statistiques (début décembre) provenant du site hat-trick.fr révèlent les qualités de Diego Costa à ce poste. Cesc Fabregas, plus reculé pour mieux orienter le jeu (sa position préférée), frappe fort pour son retour en Angleterre : onze passes décisives  – Eden Hazard, meilleur passeur de Chelsea l’an dernier en Premier League en a réalisé 7  – dont quelques caviars pour l’ancien de l’Atléti. De plus, Cesc Fabregas est le joueur qui réussit le plus de passes depuis le début du championnat (989). Et nous sommes qu’en décembre. Diego Costa affole déjà les défenses anglaises. Attaquant redoutable et redouté, il est sûrement l’un des attaquants les plus gênants à jouer pour la défense adverse. Car même quand il est moins bon, son côté de vicieux reprend le dessus et est décisif : à l’Etihad Stadium contre Manchester City, Diego Costa n’a pas fait un exceptionnel match. Jusqu’à cette 67ème minute. Paulo Zabaleta récolte un second carton jaune après un accrochage avec Diego Costa. Chelsea marquera quelques minutes plus tard.

Ainsi, Diego Costa a pris une nouvelle dimension depuis maintenant de nombreux mois. Beaucoup doutaient de son acclimatation avec la Premier League. On parlait même de flop. Il n’en est rien pour l’instant. Alors oui, on est à peine en Décembre, mais de telles statistiques n’ont rien à voir avec le hasard. C’est le fruit d’une bonne intégration dans une équipe, un collectif, des partenaires, un jeu et un entraîneur. Le plus dur arrive : être régulier tout au long de la saison et faire gagner des titres à Chelsea. Un nouveau défi. Encore. Toujours.

rany

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